L’Arabie Saoudite disposera de la bombe atomique pakistanaise



L’Arabie saoudite a conclu un accord avec le Pakistan lui permettant de disposer quand bon lui semble de ses armes nucléaires, selon un rapport de la BBC d’avant hier.

Le correspondant de la chaîne britannique pour les questions de défense Mark Urban cite des sources (tant identifiées qu’anonymes) pour démontrer que les saoudiens pourraient être en mesure de déployer des armes nucléaires bien avant l’Iran.

S’il est vrai que l’intérêt des Saoudiens pour le programme nucléaire pakistanais est de notoriété publique depuis des années, Urban affirme que cette année, pour la première fois, le royaume wahhabite a acheté et payé le droit d’utiliser les bombes, qui pour l’instant resteront stationnées au Pakistan :


Plus tôt cette année, un responsable de haut rang de l’OTAN m’a dit qu’il a vu des documents qui indiquent que des armes nucléaires fabriquées au Pakistan pour le compte de l’Arabie saoudite sont en attente de livraison. Le mois dernier, lors d’une conférence en Suède, Amos Yadlin, un ancien dirigeant des services de renseignement israélien, a déclaré que si l’Iran venait à acquérir la bombe, ’’les saoudiens n’attendront pas un mois’’. Ils ont déjà payé pour la bombe, ils vont se rendre au Pakistan et emporter ce qu’ils doivent emporter.

Des sources digne de confiance ont toutefois corrigé Yadlin, précisant que l’Iran n’est pas l’enjeu principal car on sait que l’intérêt saoudien pour la bombe date de bien avant la naissance du programme nucléaire iranien. Mohammed Khilewi, un diplomate saoudien en poste à New York à la mission de son pays à l’ONU, avait fait défection en 1994 avec des dizaines de milliers de documents qu’il avait décrits comme illustrant l’intérêt saoudien pour l’arme nucléaire depuis 1975. Selon les déclarations de Khilewi, le royaume wahhabite a investi 5 milliards de dollars dans le programme nucléaire irakien en 1985 – au point fort de la guerre entre l’Iran et l’Irak – avec l’idée qu’il finirait par obtenir quelques missiles si le programme venait à aboutir.

En 2008, un ancien responsable de la CIA, Bruce Reidel, rapportait dans une chronique publiée par la Brookings Institution que les Saoudiens avaient soutenu très activement les Pakistanais en 1998, leur fournissant 50 000 barils de pétrole à titre gracieux après qu’ils ont effectué leurs essais nucléaires en réponse aux essais indiens.

Le général Feroz Hassan Khan, dans son livre Eating the Grass sur l’histoire du programme nucléaire pakistanais (cité par Urban), rapporte que peu après l’essai nucléaire pakistanais de 1998, le ministre de la Défense saoudien le prince Sultan bin Abdulaziz al Saud avait séjourné au Pakistan et fait la tournée des installations nucléaires du pays en compagnie de l’auteur de la bombe pakistanaise A.G. Khan. 

Khan n’a pas seulement conçu la bombe pakistanaise, mais a aussi dirigé le processus de son adaptation au missile chinois CSS-2, dont les Saoudiens ont acheté 36 exemplaires à la fin des années 1980. Freoz Khan a écrit que la visite par le prince Sultan des laboratoires nucléaires pakistanais ne prouve pas l’existence d’un accord entre les deux pays, mais reconnaît que « l’Arabie saoudite a fourni un soutien financier généreux permettant au Pakistan de poursuivre son programme nucléaire ».

Depuis 2007, les Saoudiens ont commencé à faire part avec une insistance croissante leurs inquiétudes à l’égard de l’Iran et à menacer de se munir eux-mêmes de la bombe si les Iraniens réussissaient à la construire. L’année dernière, selon Urban, des responsables saoudiens à Riyad ont haussé le ton, pour la première fois en public, en déclarant à un journaliste du Times qu’il « serait complètement inacceptable de voir l’Iran avec une capacité nucléaire et pas le royaume ».


Du côté pakistanais, un haut responsable a confirmé à Urban l’ampleur de l’entente entre les deux pays, et demandé : « Pourquoi pensions-nous que les Saoudiens nous donnaient tout cet argent ? Pas par charité. » Un ancien haut responsable du renseignement, lui aussi pakistanais, lui a confié qu’il croyait « que les Pakistanais ont certainement entretenu un certain nombre d’ogives sur la base et si les Saoudiens devaient à un moment donné les reclamer, elles leurs seraient immédiatement transférées ».

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