Assad à une télévision suisse : Je n’attaque pas le peuple, je le défends


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L’entretien du président Assad par la télévision suisse allemande SRF1 s’est déroulé le 19 octobre à Damas. Le ministère syrien de l’information a exigé qu’il soit diffusé en Suisse dans son intégralité. [ASI]
Interview du Président syrien Bachar al-Assad par la télévision suisse SRF1 – 19 octobre 2016



Journaliste : Monsieur le Président, nous vous sommes très reconnaissants d’avoir accueilli la télévision suisse et notre émission Rundschau ici à Damas.
Président Assad : Vous êtes les bienvenus en Syrie.
Question : Tout d’abord, permettez-moi de clarifier une chose : je peux vous poser n’importe quelle question ?
Président Assad : N’importe laquelle, sans exception.
Question : Je vous le demande parce que l’une de vos conditions était que cette interview soit diffusée dans son intégralité. Avez-vous peur que nous manipulions vos déclarations ?
Président Assad : Vous devriez répondre vous-même à cette question, mais je pense que nous devons construire cette relation sur la confiance, et je présume que vous vous préoccupez de la confiance de votre audience, donc je ne pense pas. Il me semble que vous avez la réputation d’être honnêtes dans tous les sujets que vous essayez de couvrir.
Question : Le monde vous considère comme un criminel de guerre. Considérez-vous que ce soit une accusation mensongère ?
Président Assad : Cela dépend de ce à quoi on se réfère pour la définition de ce terme. Est-ce le droit international, ou est-ce l’agenda occidental ou l’humeur politique occidentale, disons, qui sont définis par des politiciens de l’Ouest ayant des intérêts directs dans ce dossier ? Selon le droit international, en tant que Président, en tant que gouvernement et en tant qu’armée syrienne, nous défendons notre pays contre les terroristes qui ont envahi la Syrie comme mercenaires agissant pour le compte d’autres pays. Si vous voulez revenir à cette notion de « criminel de guerre », je pense que les premiers qui doivent être jugés à ce titre sont les responsables occidentaux, en commençant par George Bush, qui a envahi l’Irak sans mandat du Conseil de sécurité. Deuxièmement, Cameron et Sarkozy, qui ont envahi et détruit la Libye sans mandat du Conseil de sécurité. Troisièmement, les responsables occidentaux qui soutiennent les terroristes depuis cinq ans en Syrie, que ce soit en leur fournissant un parapluie politique, en les soutenant directement avec des armements, ou en imposant un embargo sur le peuple syrien qui a conduit à la mort de milliers de civils syriens.
Question : Mais nous sommes ici pour parler de votre rôle dans cette guerre, et le Secrétaire d’Etat américain John Kerry vous a appelé à la fois « Adolf Hitler » et « Saddam Hussein ». Cela vous dérange-t-il ?
Président Assad : Non, parce qu’ils ne disposent d’aucune crédibilité. C’est le premier point. Deuxièmement, en tant que Président, ce dont je me soucie d’abord et avant tout est la façon dont le peuple syrien me regarde ; d’autre part, de mes amis du monde entier – je ne parle pas de mes amis personnels en tant que Président, je veux dire les amis de la Syrie, comme la Russie, l’Iran, la Chine, et (d’autres pays dans) le reste du monde – pas de l’Occident, cet Occident qui a toujours essayé de personnaliser les choses, afin de dissimuler ses objectifs réels qui sont la destitution du gouvernement et se débarrasser d’un certain Président afin de le remplacer par des marionnettes en fonction de son agenda. Donc, pour revenir à votre question, non, je ne me soucie pas de ce que dit Kerry, pas du tout. Cela n’a aucune influence sur moi.
Question : Vous êtes le Président d’un pays dont les citoyens fuient, la moitié de vos concitoyens. Les gens ne fuient pas seulement à cause des terroristes, de Daech, ou des rebelles, mais aussi à cause de vous.
Président Assad : Que voulez-vous dire par moi ? Je ne demande pas aux gens de quitter la Syrie, je ne suis pas en train d’attaquer les gens ; je défends le peuple. En réalité, les gens quittent la Syrie pour deux raisons : la première est l’action des terroristes, l’action directe de tuer le peuple. La seconde est l’action des terroristes afin de paralyser la vie en Syrie : attaquer les écoles, détruire les infrastructures dans tous les secteurs. Troisièmement, l’embargo de l’Occident qui a poussé de nombreux Syriens à aller trouver leur subsistance en dehors de la Syrie. Telles sont les principales raisons. Vous pouvez peut-être voir que le deuxième et le troisième facteurs sont liés, je veux dire le rôle des terroristes et de l’Occident dans la sape des moyens de subsistance des Syriens est identique, c’est un point commun entre les terroristes et l’Europe.
Question : Quand vous parlez de terroristes, qui voulez-vous désigner ? Daech, certes, mais aussi l’ « Armée syrienne libre » ou les Kurdes ?
Président Assad : Je désigne les mêmes personnes que vous désigneriez en tant que citoyen suisse : quiconque porte des armes et tue des gens à n’importe quel titre, commettant des actes de vandalisme, détruisant des biens publics ou privés, est un terroriste. Toute personne qui adopte une voie politique afin de réaliser un changement quelconque n’est pas un terroriste. Vous pouvez le désigner comme faisant partie de « l’opposition ». Mais vous ne pouvez pas désigner comme « membre de l’opposition » quelqu’un qui tue des gens ou prend les armes, ni dans votre pays, ni dans mon pays.
Question : Eh bien, vous ne disposez pas d’opposition libre dans votre pays.
Président Assad : Bien sûr que si, bien sûr que nous en avons une. Nous avons une véritable opposition, nous avons des gens qui vivent en Syrie, dont la base est le peuple syrien, ils ne sont pas une opposition qui a été forgée dans d’autres pays comme la France ou le Royaume-Uni, l’Arabie Saoudite ou la Turquie. Nous avons une telle opposition, et vous pouvez aller à leur rencontre et les filmer avec votre caméra. Vous pouvez le faire vous-même.
Question : Comment expliquez-vous à vos trois enfants ce qui se passe à Alep ? Je suis sûr que vous en parlez à la table familiale.
Président Assad : Oui, bien sûr que je leur explique ce qui se passe, je leur explique ce qui se passe en Syrie, et non seulement à Alep, en prenant en considération le fait que mes enfants sont des adultes maintenant, et qu’ils comprennent ce que qui se passe en Syrie. Mais si vous voulez expliquer à eux ou à tout autre enfant ce qui se passe, vous devez expliquer le rôle des terroristes, le rôle du Qatar, de la Turquie, de l’Arabie Saoudite qui soutiennent ces terroristes avec de l’argent, avec un soutien logistique, et le rôle de l’Occident qui soutient les terroristes soit avec de l’armement, soit en les aidant avec de la propagande et de la publicité. Je dois leur expliquer absolument tout ce qui se passe.
Question : En tant que père, dites-vous aussi que vous n’avez rien à voir avec les bombardements des hôpitaux à Alep ?
Président Assad : Ecoutez, quand ils disent que nous bombardons les hôpitaux, cela implique que nous sommes en train de tuer des civils. Tel est le sens de ces paroles. La question est pourquoi le gouvernement tuerait-il des civils, que ce soit dans les hôpitaux, dans les rues, dans les écoles ou ailleurs ? Vous parlez de tuer les Syriens. Si nous tuons des Syriens, en tant que gouvernement ou en tant qu’armée, la plus grande partie de la société syrienne sera contre nous. Nous ne pouvons pas réussir dans notre guerre si nous tuons des civils. Donc cette histoire et ce récit sont fallacieux, pour être franc avec vous. Bien sûr, malheureusement, toute guerre est une mauvaise guerre, dans toutes les guerres vous avez des victimes innocentes, que ce soit les enfants, les femmes, les personnes âgées, tout autre civil, tout autre innocent qui ne fait pas partie de cette guerre pourraient payer le prix, c’est une triste réalité. Voilà pourquoi nous devons lutter contre le terrorisme. Lorsque nous ne disons pas cela, cela revient à dire – selon le récit supposé par votre question – que les terroristes, Al-Qaïda, Al-Nusra, Daech, protègent les civils, et que nous, en tant que gouvernement, nous tuons les civils. Qui peut croire une telle chose ? Personne.
Question : Mais qui d’autre a des avions ou des bombes anti-bunker en dehors de votre armée ?
Président Assad : On dirait que vous prétendez que tous ceux qui sont tués en Syrie le sont par les avions ou les hélicoptères ! La majorité des victimes ont été tuées par des obus de mortiers tirés sur eux par les terroristes pendant qu’ils étaient à l’école, dans les hôpitaux, dans les rues, partout. Elles ne sont pas liées au bombardement aérien. Parfois, vous avez des bombardements aériens contre les terroristes, mais cela ne signifie pas que chaque bombe qui est tombée quelque part était larguée par avion ou par l’armée syrienne. Si vous parlez d’un incident spécifique, par exemple, nous devons vérifier l’incident spécifique, mais je vous réponds ici de manière générale.
Question : Mais vous avez aussi le pouvoir de changer la situation pour les enfants à Alep.
Président Assad : Bien sûr, et c’est pourquoi…
Journaliste : Allez-vous le faire ?
Président Assad : Exactement, telle est notre mission, conformément à la Constitution, conformément à la loi ; nous devons protéger le peuple, nous devons nous débarrasser des terroristes d’Alep. Voilà comment nous pouvons protéger les civils. Comment pouvez-vous les protéger tant qu’ils sont soumis au contrôle des terroristes ? Ils sont tués par eux, et ils sont entièrement contrôlés par les terroristes. Notre rôle est-il de nous asseoir de côté et de regarder ? Est-ce la façon dont nous pouvons protéger le peuple syrien ? Nous devons attaquer les terroristes, c’est une évidence.
Question : Puis-je vous montrer une image ?
Président Assad : Bien sûr.
Journaliste : Ce jeune garçon est devenu le symbole de la guerre. Je pense que vous connaissez cette image.
Président Assad : Bien sûr je l’ai vue.
Journaliste : Son nom est Omran. Il a cinq ans.
Président Assad : Oui.
Journaliste : Couvert de sang, effrayé, traumatisé. Y a-t-il quelque chose que vous souhaitiez dire à Omran et à sa famille?
Président Assad : Il y a quelque chose que je voudrais vous dire à vous tout d’abord, parce que je veux que vous reveniez après mon interview, et aller sur Internet pour voir la même image de ce même enfant, avec sa sœur, tous deux ont été sauvés par ceux qu’on appelle les « Casques blancs » en Occident, et qui sont un lifting d’Al-Nusra à Alep. Ces enfants ont été sauvés deux fois, chacune dans un incident différent, dans le cadre de la propagande de ces « Casques blancs ». Aucun de ces incidents n’était vrai. De telles manipulations sont possibles, et il s’agit bien d’une manipulation. Je vais vous envoyer ces deux images, elles sont sur internet, afin de vous montrer qu’il s’agit d’une image fabriquée, et pas d’une vraie. Nous avons des images réelles d’enfants blessés, mais celle-ci en particulier est un faux.
Question : Mais il est vrai que des civils innocents meurent à Alep.
Président Assad : Bien sûr, et pas seulement à Alep, dans toute la Syrie. Mais vous me parlez d’Alep maintenant à cause de toute l’hystérie en Occident autour d’Alep, pour une raison simple ; non pas parce qu’Alep est en état de siège, car Alep a été assiégée par les terroristes durant les quatre dernières années, et nous n’avons pas entendu la moindre question posée par les journalistes occidentaux au sujet de ce qui se passait à Alep, pas plus que nous n’avons entendu la moindre déclaration de responsables occidentaux au sujet des enfants d’Alep durant toutes ces années. Ils ne parlent d’Alep que maintenant, et seulement parce que les terroristes y sont en mauvaise posture. C’est la seule raison, parce que l’Armée syrienne y gagne du terrain, et les pays occidentaux – principalement les États-Unis et leurs alliés comme le Royaume-Uni et la France – ont le sentiment qu’ils perdent leurs dernières cartes du terrorisme en Syrie, et le bastion principal de ce terrorisme est aujourd’hui Alep.
Question : Tout vous est permis dans cette guerre.
Président Assad : Non, bien sûr, il faut obéir au droit international, à la Charte des droits de l’homme. Mais dans toutes les guerres, dans toutes les guerres de l’Histoire, il est impossible d’assurer à 100% qu’on pourra tout contrôler à cet égard. Vous avez toujours des fautes, et c’est pourquoi je dis que toute guerre est une mauvaise guerre. Mais il y a une différence entre les erreurs individuelles et la politique du gouvernement. Dire que la politique du gouvernement est d’attaquer des civils, d’attaquer les hôpitaux, d’attaquer les écoles, de commettre toutes ces atrocités, ce n’est pas possible, parce que vous ne pouvez pas œuvrer ou aller à l’encontre de vos intérêts. Vous ne pouvez pas aller à l’encontre de votre devoir envers le peuple, sinon vous allez perdre la guerre en tant que gouvernement. Vous ne pouvez pas résister à une guerre d’une telle férocité pendant cinq ans et demi alors que vous tuez votre propre peuple. C’est impossible. Mais vous avez toujours des erreurs, que ce soit à cause des tirs croisés, des erreurs individuelles… apportez-moi une guerre, une seule guerre dans l’histoire récente, qui fut une guerre propre. Vous n’en trouverez pas.
Question : Est-ce que vous aussi, vous avez commis des erreurs dans cette guerre ?
Président Assad : En tant que Président, je définis la politique du pays, et les principaux piliers de cette politique au cours de la crise sont (premièrement), de lutter contre le terrorisme, ce qui je pense est juste, et nous ne changerons pas cette orientation. (Deuxièmement), bien sûr, de promouvoir le dialogue entre les Syriens, et je pense que c’est une bonne voie. Troisièmement, le pilier qui a prouvé son efficacité au cours des deux dernières années est la réconciliation : réconciliations locales avec les militants qui ont porté les armes contre le peuple, contre le gouvernement et contre l’armée, et cette mesure s’est avérée efficace. Tels sont les piliers de cette politique. On ne peut pas parler d’erreurs dans cette politique. Vous pouvez parler d’erreurs dans la mise en œuvre de cette politique, qui pourraient être liés à des individus.
Question : Vous croyez encore à une solution diplomatique ?
Président Assad : Absolument, mais il n’y a pas à proprement parler de solution diplomatique ou de solution militaire ; il y a une solution, mais chaque conflit a de nombreux aspects, et l’un d’entre eux est la sécurité, comme dans notre situation, et l’autre est l’aspect politique de cette solution. Par exemple, si vous me demandez comment il faut agir avec à Al-Qaïda, avec Al-Nusra, avec Daech ? Est-il possible de négocier avec eux ? Ils ne négocieront pas, ils ne sont pas prêts à cela, ils ne le seront jamais. Ils ont leur propre idéologie, une idéologie répugnante, de sorte que vous ne pouvez pas trouver de solution politique avec ces groupes ; vous devez les combattre, vous devez vous en débarrasser. Alors que si vous parlez de dialogue, vous pouvez dialoguer avec deux types d’entités ; la première, les entités politiques, toutes les entités politiques, qu’elles soient avec ou contre vous ou neutres ; (la seconde), avec chaque militant qui est prêt à déposer les armes au profit de la sécurité et de la stabilité en Syrie. Bien sûr, nous y croyons.
Question : Des nouvelles de Russie évoquent une courte pause humanitaire à Alep pour jeudi [20 octobre]. Que signifie cette pause humanitaire, pouvez-vous nous l’expliquer ?
Président Assad : C’est un court arrêt des opérations afin de permettre l’approvisionnement humanitaire de parvenir dans différentes zones d’Alep, et en même temps de permettre aux civils qui souhaitent quitter les zones contrôlées par les terroristes de passer dans la zone contrôlée par le gouvernement.
Question : Est-ce vraiment une étape importante ?
Président Assad : Bien sûr, il s’agit d’une première étape importante, mais cela ne suffit pas. Il s’agit de la poursuite des opérations : comment pouvez-vous permettre à ces civils de partir ? La majorité d’entre eux voulait quitter la zone contrôlée par les terroristes, mais ils l’interdisent. Soit ils leur tirent dessus, soit ils tuent leurs familles s’ils quittent cette zone.
Question : La Russie est de votre côté, qu’est-ce que cela signifie pour vous ?
Président Assad : Non, elle n’est pas de notre côté. Elle est du côté du droit international. Elle est du côté qui est opposé au camp des terroristes. Telle est la position de la Russie, parce qu’elle veut faire en sorte que le droit international l’emporte, non pas l’agenda occidental consistant à renverser tous les gouvernements qui ne se plient pas à leurs visées. La Russie veut s’assurer que le terrorisme ne prévaudra pas dans cette zone, car cela affecterait négativement les Russes eux-mêmes, la Russie elle-même en tant que pays, ainsi que l’Europe et le reste du monde. Voilà ce que cela signifie pour la Russie de se tenir aux côtés du gouvernement syrien légitime et du peuple syrien.
Question : Monsieur le Président, vous utilisez des armes chimiques et des bombes-baril en Syrie contre votre propre population, ce sont des rapports de l’ONU (qui l’indiquent), vous ne pouvez pas l’ignorer.
Président Assad : Vous parlez de deux questions différentes. Il a été démontré que la question chimique était mensongère, et ils n’ont pas la moindre preuve indiquant que l’armée syrienne ait utilisé des armes chimiques, en particulier avant que nous ayons renoncé à notre arsenal en 2013, car maintenant nous n’en avons plus de toute façon. Avant cela, c’était de la fiction parce que si vous voulez utiliser une telle arme de destruction massive, vous allez tuer des milliers de personnes d’un coup, et aucun incident de ce genre n’a eu lieu. Du reste, nous ne pourrions pas l’utiliser parce que cela reviendrait à tuer notre propre peuple, ce qui est contre notre intérêt. Ceci est donc une fausse allégation. Nous n’avons pas à perdre notre temps avec elle. Nous vivons en Syrie, il y a une guerre traditionnelle, mais il n’y a rien qui soit lié à des armes de destruction massive.
Journaliste : Mais le rapport de l’ONU n’est pas une fiction.
Président Assad : Le rapport de l’ONU n’a jamais été crédible, jamais, parce qu’ils ont émis des rapports basés sur des allégations, sur d’autres rapports, des rapports falsifiés, et ils présentent cela comme un rapport [sérieux]. Ont-ils envoyé une délégation pour faire enquête ? Ils en ont envoyé une en 2013, et elle n’a pas pu établir que l’armée syrienne avait utilisé des armes chimiques. Voilà pour le premier point. Deuxièmement, un point encore plus important, le premier incident a eu lieu début 2013 à Alep, lorsque nous avons déclaré que les terroristes avaient utilisé des armes chimiques contre notre armée, et nous avons invité les Nations Unies à envoyer une délégation. Voilà ce que nous avons fait, mais à cette époque, les Etats-Unis se sont opposés à cela parce qu’ils savaient déjà que cette enquête – bien sûr si elle était impartiale – allait prouver que ces terroristes, leurs mercenaires, avaient utilisé des armes chimiques contre l’Armée syrienne.
En ce qui concerne les bombes-baril, je veux vous demander : quelle est la définition d’une bombe-baril ? Si vous allez vous enquérir auprès de notre armée, vous ne trouverez rien qui soit appelé « bombe-baril », alors comment comprenez-vous – afin que je sache comment je peux vous répondre – ce qu’est une bombe-baril ? Nous avons des bombes…
Journaliste : La destruction… il s’agit de la destruction (causée par ces bombes), et c’est contraire au droit humanitaire.
Président Assad : Toute bombe cause des destructions, toute bombe, il n’existe pas de bombe qui ne cause rien. C’est un mot qui a été utilisé dans l’Ouest dans le cadre du récit occidental visant à faire croire qu’il y a des bombardements indiscriminés qui ont tué des civils sans distinction, ce qui du reste contredit le récit occidental lui-même, je vais vous montrer la contradiction : dans d’autres lieux, ils prétendent que nous bombardons intentionnellement les hôpitaux, comme vous l’avez mentionné, que nous ciblons délibérément les écoles, et que nous avons ciblé intentionnellement les convois humanitaires à Alep le mois dernier, mais ces objectifs requièrent des missiles de précision. Donc, ils doivent choisir quelle partie du récit est vraie : soit nous employons des bombes indiscriminées, soit nous employons des bombes de précision. Ils ne cessent de se contredire dans le même récit, telle est la réalité occidentale maintenant. Alors, quelle version choisir ? Je peux vous répondre, mais encore une fois, nous ne disposons pas de bombes indiscriminées. Si nous tuons les gens sans distinction, cela signifiera que nous perdons la guerre parce que les gens seront contre nous. Je ne peux pas tuer le peuple syrien, ni sur le plan de la morale, ni dans mon seul intérêt, parce que dans ce cas, je pousserais la communauté et la société syriennes vers les terroristes, et non l’inverse.
Question : Je voudrais mentionner le sujet des prisons où la torture est exercée, Monsieur le Président. Amnesty parle de dix-sept mille morts. En ce qui concerne la prison de Saidnaya, il y a encore des rapports horribles. Quand allez-vous permettre à un observateur indépendant de visiter cette prison ?
Président Assad : Amnesty International n’est pas indépendant, ce n’est pas un organisme impartial.
Journaliste : Et le CICR ?
Président Assad : Nous n’avons pas évoqué cette question avec la Croix-Rouge, nous n’en avons pas parlé. Cela devrait être abordé au sein de nos institutions, si nous souhaitons autoriser… s’il y a des allégations (de torture), cela pourrait être discuté. Nous ne disons pas oui ou non, mais le rapport que vous avez mentionné a été établi par le Qatar, et financé par le Qatar. Vous ne connaissez pas la source, vous ne connaissez pas les noms de ces victimes, rien n’est vérifié à propos de ce rapport. Il a été directement financé par le Qatar dans le but de diffamer et salir le gouvernement syrien et l’armée syrienne.
Journaliste : Mais il y a beaucoup de témoins oculaires.
Président Assad : Personne ne sait qui ils sont. Vous n’avez rien de clair à ce sujet. Ce n’est pas vérifié. Donc non.
Journaliste : Ouvrez donc la porte à des organisations comme la Croix-Rouge.
Président Assad : La décision n’est pas de mon ressort. Nous avons des institutions, si nous devons discuter de cette question, nous avons besoin de solliciter les institutions compétentes pour pouvoir dire oui ou non.
Question : Pourquoi êtes-vous sûr que vous allez gagner cette guerre ?
Président Assad : Parce que nous devons défendre notre pays, et nous devons croire que nous pouvons gagner la guerre pour défendre notre pays. Si nous n’avions pas cette conviction, nous serions vaincus. Vous savez, une partie de la guerre est ce en quoi nous croyons, donc il est évident et intuitif que nous devons absolument avoir cette conviction.
Question : Lorsqu’on marche à travers Damas, on voit que votre photo est partout, dans chaque boutique, dans tous les restaurants, dans chaque voiture, un symbole pour un dictateur, est-ce votre façon d’asseoir votre pouvoir ?
Président Assad : Il y a une différence entre un dictateur et une dictature. Le dictateur est une personne (qui agit en tant que tel). Je n’ai pas demandé à quiconque en Syrie d’arborer ma photo, je ne l’ai fait. Voilà le premier point. Deuxièmement, pour décrire quelqu’un comme un dictateur, vous devez vous enquérir auprès de son peuple, je veux dire qu’il n’y a que son peuple qui peut dire qu’il est un dictateur ou qu’il est quelqu’un de bien.
Journaliste : Monsieur le Président, je vous remercie d’avoir répondu à nos questions pour la télévision suisse et l’émission Rundschau.
Président Assad : Je vous remercie d’être venus en Syrie.

Fin

[Source Vidéo: agence syrienne Sana]
Interview avec Baschar al-Assad (English) – 19.10.2016



Rundschau: SRF – Interview mit Baschar al-Assad (Deutsch) – 19.10.2016




Traduit de l’anglais par Arrêt sur Info

Photo: Sana

Source: http://arretsurinfo.ch/video-assad-a-une-television-suisse-je-nattaque-pas-le-peuple-je-le-defends/

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